Grégory Cottard : la préparation du cheval et du cavalier vers le haut-niveau

by

Suite à une longue discussion en ce mois d’août 2020, Grégory Cottard et moi avons tenté de retranscrire à travers La Buvette les questions et réflexions autour de sa préparation en tant que cavalier de haut-niveau au parcours atypique et sur la préparation des chevaux de sport à l’ère contemporaine : surpréparation des chevaux, équipement, compétitions.

Retrouvez notre discussion en vidéo sur Instagram IGTV ou retranscrite ci-dessous !

INTERVIEW
Ma première question pour démarrer cette Buvette concerne ton parcours. Tu es cavalier professionnel jusqu’en 5*, tu as déjà fait partie de l’équipe de France, et tu as été champion de France Pro Elite, le plus haut-niveau en épreuve nationale, et contrairement à d’autres cavaliers français reconnus à l’international, tu n’as pas suivi un cursus traditionnel. Est-ce que tu peux nous raconter comment tu es venu à exercer ce métier ?

J’ai toujours été passionné par les chevaux. J’ai voulu absolument faire mes études dans ce milieu. J’ai passé un monitorat. Une fois le monitorat passé, il m’a fallu trouvé un job. J’ai été embauché en tant que cavalier de propriétaires donc j’entraînais des cavaliers et leurs chevaux pour faire du concours. Un jour, une place s’est libérée en tant que cavalier maison, j’ai commencé à sauter un petit peu et ils m’ont offert l’opportunité d’aller faire du concours et ça a commencé à s’enclencher pour moi. J’avais 23-24 ans lorsque que j’ai fait mes premières compétitions en tant que pro.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

La fédération française d’équitation a mis en place un certain nombre de compétition pour fabriquer les champions de demain : les épreuves Poney Elite, les championnats Junior, Jeunes Cavaliers… auxquels tu n’as jamais participé. Comment as-tu travaillé pour améliorer techniquement et instinctivement ton équitation ?

J’ai travaillé. Je travaille encore, j’apprends encore tous les jours. J’apprends de tout le monde. J’ai travaillé longtemps avec Michel Berthier qui m’a appris beaucoup sur le plat et à l’obstacle parce que j’avais beaucoup d’appréhension de sauter même un croisillon donc il m’a réappris à fonctionner et aller de l’autre côté de la barre. A partir de ce moment, j’ai puisé dans les ressources de tout le monde. J’ai beaucoup travaillé avec Gilbert Doerr, Eric Navet, Jérôme Hurel, je peux en citer plein ! J’ai pris plein d’informations et ce que j’aime, c’est prendre des informations, puis aller travailler tout seul. Ça peut durer quinze jours, six mois, un an mais je mets toujours du temps à digérer les informations. Je ne suis pas quelqu’un de très doué à cheval à la base. Quand je dis ça, les gens sont toujours un peu étonnés mais quand j’ai passé mon monitorat, je n’étais pas le meilleur à cheval. Alors j’ai beaucoup travaillé. Le côté autodidacte me vient de cette difficulté à digérer les informations, à faire instantanément les exercices qu’on m’a donné. J’ai besoin d’être concentré, être tranquillement dans mon coin.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

Le mental du cavalier de haut-niveau se forge avec l’expérience. C’est quelque chose qui t’a été inculqué plus tardivement. Comment as-tu vu ton mental évolué ces dernières années ? Et quelles méthodes as-tu mises en place pour le perfectionner encore aujourd’hui ?

J’ai des hauts et des bas comme tout le monde. Pour le travail du Championnat de France, j’ai mis tout en place dans ma saison de concours de façon à réaliser chaque parcours comme si c’était un championnat. Je courrais la chasse le premier jour, qui était en général barème A, avec Pepyt des Elfs. Je me disais : “là t’as été trop vite, là t’as fait une faute”. Je me conditionnais vraiment à imaginer que chaque concours était un championnat et on va voir si la jument se dégrade parce que je vais trop vite. Sur un parcours à 4 ou 8 points, comment je réagis etc. Ça m’a permis d’acquérir beaucoup de confiance parce que je savais où j’allais. Pour moi, c’est ce qu’il y a de plus important : avoir tout bien bachoté avant d’aller faire le concours où ça va être difficile. Je préfère que ce soit difficile à la maison et plus facile après au concours.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

On te voit régulièrement en concours en Belgique. La Belgique fonctionne différemment de la France concernant la compétition et le commerce de chevaux notamment. Les chevaux sont généralement très préparés. Selon toi, est-ce que la surpréparation des chevaux de sport – en France ou à l’étranger – mènent à un sport biaisé ?

C’est vrai que quand je vais en Belgique, il n’y a pas un cheval qui ne me plait pas. Alors je me dis “mince, comment ils font pour avoir tous des cracks !” mais je crois que chaque pays fonctionne différemment. Nous en France, on fonctionne beaucoup à l’instinct, sur le côté latin, sur la qualité des chevaux, sur la qualité intrinsèque du cheval alors que dans certains pays encore maintenant, ils travaillent le côté tout “mâcher” au niveau du cheval, c’est-à-dire qu’ils doivent tellement conditionner les chevaux dans un système que les chevaux doivent rester dans le système. Ils leur apprennent ça. C’est quelque chose que je n’ai pas du tout l’habitude de pratiquer, je fonctionne vraiment à l’instinct.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

Par conséquent, une valeur des chevaux de sport d’aujourd’hui est-elle biaisée ? Comment peut-on être sûr de regarder ou d’acheter un « vrai » bon cheval ?

C’est l’expérience qui va entrer en jeu. Il y a des gens qui vont préférer des chevaux avec beaucoup de moyens et lent et ils vont se sentir bien avec ça. Quand je regarde un cheval, ça marche au coup de foudre, j’aime la vitesse où il décolle du sol, la rapidité au sol, la qualité du cheval, de son envie de faire. C’est plus comme ça que j’analyse un cheval et comment je le sélectionne.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

On utilise aujourd’hui beaucoup l’équipement pour améliorer la performance des chevaux : les muserolles, les guêtres postérieures notamment. Pour toi, quelles conséquences cela a sur le sport d’aujourd’hui ?

Je fais un peu comme tout le monde, je pratique un petit peu tout. Je ne suis pas un adepte des gros mors et des grandes muserolles, je suis pas un grand fan de fermer la bouche des chevaux et de les emmener dans une contrainte. Pour les guêtres postérieures, c’est une polémique. Est-ce qu’on doit en faire une ? A partir du moment où c’est bien géré, bien dosé… Quand on monte des ballot de foin dans les greniers, on utilise bien des bracelets de force pour se soutenir. De la même façon, je constate que j’améliore le galop des chevaux rien qu’avec des guêtres postérieures. Je pense qu’à partir du moment où c’est bien utilisé, il n’y a pas de raison que ce soit néfaste pour le cheval.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

Je viens d’évoquer avec toi la surpréparation des chevaux et l’utilisation de l’équipement pour améliorer les performances des chevaux de sport. Il y a une question que je me pose. Est-ce qu’on ne devrait pas plutôt laisser la nature du cheval s’exprimer et que le travail du cavalier ne serve finalement qu’à sublimer l’existant ? Je me demande si l’humain n’a pas une meilleure carte à jouer dans le sport équestre et la performance des chevaux en étudiant toujours davantage l’élevage pour l’améliorer, en perfectionnant l’équitation et les compétences en dressage du cavalier de cso, en étudiant davantage l’éthologie ou en modifiant le système des compétitions et d’évaluation des chevaux par exemple. Est-ce qu’en voulant gagner du temps finalement on en perd pas sur le long terme : avec des chevaux qui performent plus difficilement dans la durée, qui ont besoin d’un soutien vétérinaire conséquent, des infiltrations, des opérations cliniques etc. Quel est ton sentiment, quelle est ta vision par rapport à ton vécu avec tes chevaux ?

Personnellement, j’ai une approche où je travaille avec un éthologue. Je suis toujours à la recherche de progression, d’amener mes chevaux le plus rapidement possible au haut-niveau. En revanche, je ne suis pas un adepte des concours Jeunes Chevaux. J’emmène bien sûr mes chevaux mais je ne fais pas tout le circuit des Jeunes Chevaux, je trouve que c’est un circuit qui est très éprouvant. Ma vision, c’est plutôt : calme et bien préparer les jeunes chevaux mais pas pour autant les emmener toutes les semaines en concours. Puis, dès 8 ans, les emmener sauter au plus haut niveau assez rapidement. Par exemple, Bibici, je l’ai emmenée sauter 1m60 fin d’année de 8 ans. Alors il y a des gens qui font les gros yeux et qui s’arrachent les cheveux mais je me dis que la carrière d’un cheval est pas super longue non plus. Et physiquement, lorsqu’ils sont bien amenés, bien préparés, il n’y a aucunes raisons que cela engendrent des conséquences. Un cheval de 9 ans a fini sa croissance. Je pense que sauter 1m40 à l’âge de 8 ans (après avoir suivi tout le circuit, ndlr), c’est plus éprouvant que de bien cibler les parcours et d’amener les chevaux sauter du haut-niveau avec des parcours moindre dans les pattes. Mon objectif est d’arriver au plus haut-niveau en sautant le moins possible de parcours et en les amenant le mieux possible.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.

Pour terminer cette Buvette, j’ai proposé à mes abonnés de te poser une question. Voici celle de happyhappymina : Aujourd’hui, en tant que cavalier professionnel, quel message as-tu envie de faire passer à travers ta vision du sport équestre ? Qu’as-tu envie que les prochaines générations de cavaliers retiennent de Gregory Cottard ?

Que je suis un Homme de Cheval. C’est le chose sur laquelle je travaille le plus aujourd’hui. Je suis un grand passionné, j’aime travailler avec mes chevaux et créer des liens surtout. J’aimerais que l’on retienne cela.

www.pegasebuz.com | Grégory Cottard : Bibici et Freezby.


Suivre Roxanne Legendre sur Instagram pour plus d’informations en temps réel

Suivre Grégory Cottard et GBS Sellier sur Instagram

Cet article vous a intéressé et vous souhaitez devenir un lecteur actif de la communauté ? Rejoignez le groupe Facebook La Buvette PegaseBuzz ou abonnez-vous à la newsletter La Buvette pour connaître les dessous du média PegaseBuzz

Suivre le média PegaseBuzz sur LinkedIn

No Comments Yet.

What do you think?

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.